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Le Golden Globe Challenge



En 1968, The Sunday Times organise pour la première fois de l'histoire une course autour du monde, en solitaire et sans escale. Ce défi, sous forme de course, qui n'eut finalement jamais de seconde édition, fut baptisé Golden Globe Challenge. Navigant au sextant, avec un matériel de survie et de communication rudimentaire, voire inexistant, neuf navigateurs s'élancent des côtes anglaises à bord d'embarcations qui n'avaient décidément pas grand chose à voir avec les bateaux de course d'aujourd'hui. À Bord de son Joshua, Moitessier a même choisi de ne pas s'encombrer d'une radio.
La course ayant été annoncée tardivement, pour que les participants aient le temps de préparer un bateau, chacun peut partir à la date qu'il souhaite, comprise entre juin et octobre (au delà, les navigateurs se trouveraient à passer le cap Horn pendant l'Hiver Austral ce qui serait trop dangereux pour de telles embarcations). Par conséquent, il y aura deux prix : un globe d'or pour le premier à établir un tour du monde sans escale en solitaire — ce que personne n'a encore jamais réussi, soit dit en passant. Et 5 000 livres pour le plus rapide à l'avoir effectué.

Avant de quitter l'Atlantique, Alex Corozzo, John Ridgway, Loïck Fougeron, Leslie King sont déjà contraints à l'abandon.
Chay Blyth, qui s'était engagé dans l'épopée sans aucune expérience de la navigation à la voile, décide raisonnablement d'abandonner après avoir franchi le cap de Bonne Espérance. Trois ans plus tard, il battra le record du tour du monde en solitaire à la voile, sans escale, dans le sens Est-Ouest.

Donald Crowhurst, passionné de voile, génie de l'électronique et chef d'une entreprise en difficulté, participe au challenge dans l'espoir de remporter la prime qui pourrait renflouer ses comptes. Pour se faire, il emprunte et hypothèque sa maison. Préparé à la hâte, son bateau ne tient pas la route et après quelques jours de course, un cruel dilemme s'offre à lui : soit il continue la course et avec un tel bateau, il perdra la vie ; soit il abandonne et il sera ruiné. Sombrant peu à peu dans la folie, il choisi une 3e voie : il fait croire qu'il est en tête alors qu'il erre dans les mers du Sud. Effrayé par les suspicions des observateurs, il finira par mettre fin à ses jours une semaine avant de franchir la ligne d'arrivée. Un documentaire britannique existe, qui relate cette histoire tragique : Deep Water.

Après 6 mois de course, Bernard Moitessier passe le cap Horn. Le français est non seulement, et de loin, le plus rapide en temps réel, mais il peut aussi rattraper Knox-Johnston, parti 2 mois avant lui, et ainsi remporter les deux prix. Pour se faire, il lui suffit de remonter l'Atlantique à son rythme habituel, ce qui, comparé aux mers australes, fait figure de vacances au soleil. Sauf que l'homme possède un brin d'anticonformisme appuyé par quelques tourments liés à une activité d'écrivain de marine, qui ne le gratifie pas toujours. Au lieu continuer de remonter l'Atlantique pour rejoindre Plymouth et ainsi profiter du fruit d'une victoire héroïque, il fait demi tour et décide de continuer sa route… vers l'Est. Il passe une seconde fois le cap de Bonne Espérance, une seconde fois le cap Leeuwin, en Australie, pour finalement accoster sur une petite île du Pacifique, après 10 mois de navigation en solitaire et un tour du monde et demi parcouru sans escale (un record qui tient toujours aujourd'hui). Pour toute explication, il envoie, à l'aide d'un lance-pierre, un petit mot sur le pont d'un pétrolier passé sur sa route : « Je continue sans escale vers les îles du Pacifique, parce que je suis heureux en mer, et peut-être aussi pour sauver mon âme. ». Moitessier passera 12 ans sur son île. Il y racontera son voyage dans La Longue Route, qui deviendra l'un des plus beaux livres de mer jamais écrit ; il y rencontrera sa seconde femme avec laquelle il aura un enfant ; il y sera plus heureux qu'il ne l'a jamais été.

Pendant ce temps, la course continue. Se croyant moins rapide que Donald Crowhurst et ses positions fictives, Nigel Tetley prend tous les risques avec un bateau mal en point et finit par sombrer à 1 100 miles de l'arrivée (2 000 km), alors qu'en réalité, il était le plus rapide depuis que Moitessier a décidé de détourner son chemin. Il sera secouru grâce à un SOS passé in extremis à la radio. Embourbé dans la couteuse construction d'un nouveau bateau, tracassé par ce naufrage inutile et cette course bêtement perdue, il finira par se suicider 2 ans plus tard.

Finalement, de cette course légendaire, seul Robin Knox-Johnston parvint à franchir la ligne d'arrivée, après 313 jours de mer. Il fit don des 5 000 £ de la prime à la famille de Crowhurst.

Il faudra attendre 1989 et le premier Vendée Globe pour qu'une telle course soit de nouveau organisée. Le record du tour du monde en solitaire est aujourd'hui détenu par Francis Joyon, en 57 jours seulement.





Note : les 3 photos qui illustrent ces lignes sont tirées du site officiel de Robin Knox-Johnston, seul arrivé au Golden Globe Challenge. Il existe également un documentaire dédié à Bernard Moitessier, disponible sur Dailymotion : Moitessier l'homme libre.

Message édité le 2 novembre 2010, après lecture du livre dédié à la course.